Parlons Grand-mère

Après une longue éclipse depuis son avant-gardiste Touki Bouki (1973) et finalement prêt à un nouveau départ, Mambety se rend en 1988 sur le tournage d'Idrissa Ouedraogo dont il avait apprécié Le Choix (1986). Il en rapporte sans préparation des rushes décousus et c'est dans la patience du montage que le film prend forme. "C'est comme s'il était en moi, dans mon village, comme s'il avait adopté cette grand-mère, les petits", dira Ouedraogo. Ce film impressif est un regard, un jeu avec les lumières et les mouvements, d'une immense poésie. Une affinité, une connivence aussi, avec les enfants et surtout avec la yaaba, la grand-mère, impressionnante de dignité, qui ne parlait pas français. Il lui dédie le seul commentaire du film : "Cinéma ou pas cinéma, grand-mère vengera l’enfant que l’on met à genoux !" Car pour le reste, ce sont les images qui parlent, succession d'émotions à partager. En 1990, Djibril Diop Mambéty commencera le tournage de son magistral Hyènes, sur une autre grand-mère.

Olivier Barlet
Critique de cinéma et rédacteur pour Africultures