Making of

Making of

"Making of" : une programmation consacrée à la "fabrication de". Qu’on installe un plateau de cinéma au fin fond de l’Amazonie ou dans une cuisine, le tournage d’un film est une aventure. S’y jouent des relations, des émotions, des dangers plus ou moins vitaux, s’y élaborent des œuvres, des pensées, des manières de faire le cinéma. Il existe une fascination partagée autour de la manière dont se fabriquent les œuvres artistiques : on veut savoir à quelle heure se lève l’écrivain, si la chanteuse écrit d’abord les paroles ou la musique, et l’état de propreté de l’atelier du peintre. Curiosité, bienvenue ou non, qui révèle l’existence à nos yeux d’un mystère. C’est qu’on se demande comment quelqu’un a pu créer quelque chose. D’où lui vient l’énergie, l’idée, le sens et la direction. Pourquoi tel geste plutôt qu’un autre ? Pourquoi tel plan plutôt que tel autre ?

Le comité de programmation de Tënk a réuni ici 6 films, 6 sortes de making of qui montrent des tournages extrêmement divers. Où l’on voit (mais on s’en doutait un peu) que le cinéma n’est certainement pas l’affaire d’une seule personne centrale et créatrice, mais bien de toute une équipe, entourée de toute une autre équipe encore plus vaste, entourée du monde tel qu’il est.

Le monde tel qu’il est, ça peut déjà être des inondations, de la boue, des douleurs ou encore des batailles à l’arc. Deux films plongent dans deux tournages épiques. L'archétype du tournage de la "scoumoune", d’abord : Terry Gilliam et son film L’homme qui tua don Quichotte. C’est dans Lost in la Mancha qu’on assiste à toutes les déconvenues de ce film maudit. Tout va contre la production, que ce soient les éléments, le corps de Jean Rochefort, le temps qui passe trop vite (et donc l’argent qui fuit). Quand le film rêvé du réalisateur se fracasse contre la réalité. Il est tellement tentant de faire le parallèle entre Gilliam et don Quichotte, les moulins, tout ça… Tentant aussi, le parallèle entre la démesure du personnage de Fitzcarraldo et la "vision" de Werner Herzog. Dans Burden of Dreams, de Les Blank, le réalisateur décide de s’aventurer loin dans la forêt amazonienne pour tourner son film. Une histoire complètement dingue d’un homme qui souhaite, notamment, hisser son énorme bateau sur le haut d’une colline. Que croyez-vous qu’il arrivât pendant le tournage ? Tout ne tourna pas complètement rond, c’est le moins qu’on puisse dire : des batailles à l’arc, certes, mais aussi de l’ennui, de l’isolement pendant des mois loin des repères, des défis techniques dangereux et, en permanence, des questionnements moraux qui mettent Herzog à l’épreuve : quel degré de risque est acceptable pour parvenir à un film ? Que sommes-nous vraiment venus chercher ici, loin de chez nous – chez d’autres gens ?

Il y a peut-être moins de "spectacle" dans Jeanne Dielman de Chantal Akerman, Ponette de Jacques Doillon, ou Yaaba de Idrissa Ouedraogo, mais leurs tournages n’en sont pas moins intenses. Dans Jouer Ponette, Doillon dirige la très jeune Victoire Thivisol (4 ans). C’est un film sur la méthode et la douceur. Et sur l’intelligence d’une toute jeune fille qui apprend aussi à faire la différence entre le jeu et la réalité : elle apprend "tout simplement" à connaître son personnage, mais est-ce vraiment donné à tout le monde ? Dans Autour de Jeanne Dielman, c’est la réalisatrice Chantal Akerman qu’on voit à l’œuvre avec son actrice principale Delphine Seyrig. Le film – tourné sur le plateau par le comédien Sami Frey – est un témoignage unique sur les méthodes de tournage d’Akerman, qui a 24 ans à l’époque : "C’est un film d’action qui se joue là, et se cherche dans les moindres détails" écrit Fabien David. "Là", c’est-à-dire dans les menus gestes, les déplacements dans l’espace domestique, ce qui fait la matière même du film. Un document passionnant et "brut" : Chantal Akerman souhaita en effet garder l’aspect "rugueux" des images, enregistrées à l’époque en format U-Matic, et ne pas étalonner l’image ni mixer le son ! Notons que Jeanne Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles fut récemment porté à la première place des "meilleurs films de tous les temps" par un ensemble de 1 600 professionnels du cinéma consultés par Sight and Sound, la revue du British Film Institute ! Direction le Burkina Faso ensuite, avec Parlons Grand-mère, de Djibril Diop Mambéty, qui filme le tournage d’un film de Idrissa Ouedraogo. Ce sont là deux grands cinéastes africains qui se rencontrent. Scènes de tournage dans un village, grand-mère et enfants, Djibril Diop Mambéty, auteur notamment de La Petite Vendeuse de soleil, aborde avec une immense poésie la fabrication du film Yaaba de son collègue Ouedraogo.

Voilà enfin un tournage particulier : l’enregistrement d’une musique. Et pas n’importe laquelle : celle de Route One/USA de Robert Kramer. Daniel Deshays, ingénieur du son et membre du comité de programmation de Tënk, nous apporte ici un document absolument inédit. Ayant participé à ces séances de travail, il fut parmi les personnes qui reçurent de la part de Kramer un DVD marqué au feutre de sa main : La Route de Barre. Des images filmées par Kramer, initialement destinées à être intégrées au film, mais qui ne connurent finalement d’existence que montées ainsi par Guy Lecorne. Entrez donc en studio, pour assister aux répétitions et improvisations de Barre Phillips, Michel Petrucciani, Pierre Favre et John Surman ! Une exceptionnelle "fabrication de" !

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