Plastic Semiotic

Dans un montage alternant plans d'ensemble et gros plans, avec un travail sonore recourant aux sons émis par certains jouets, Plastic Semiotic remet en jeu la faculté d'abstraction qu'ont tous les enfants avec leurs joujous. En quatre parties allant de l'enfance à la vieillesse, Radu Jude reconstitue avec ces objets – et en jouant du grotesque né de la différence d'échelle entre ces derniers – ce qui fonde une vie : visite chez le médecin, fêtes de Noël, école, premiers émois amoureux, relations sexuelles, travail, vacances, etc. Ce faisant, le film déplie les petits et grands drames comme les joies du quotidien, et prend un malin plaisir à basculer dans la parodie, le tragique et la cruauté. C'est aussi drôle que terrible, trivial que grinçant, stupide qu'excessif. Aussi parce que n'étant plus des enfants, ce que nous voyons ici est bien un monde de déréliction sombrant dans le chaos, en proie aux violences intimes comme collectives (viols, meurtres, guerres). Cette vie en miniature traversant les lieux communs et clichés de l'existence se donne ici comme ce qu'elle est souvent : empreinte de sauvagerie – ainsi que le signalent la première et l'ultime séquence.

Caroline Châtelet
journaliste, critique dramatique