Dernière montagne

« Bientôt, y'aura plus de bergers. Y'aura plus que des cons qui appuient sur des boutons ». Souvent de trois quarts dos, caché sous son chapeau de feutre, le mégot au coin des lèvres, Alphonse est de ces personnages qui résistent à la caméra. La couenne épaisse et le verbe fleuri dissimulent, à peine, un corps malmené par le travail et un cœur de midinette. Le filmeur venu de la ville est tombé sous le charme. Il ne cache pas sa peine à combler la distance avec l'homme et à retrouver les montagnes de son enfance. D'un tournage étalé sur 5 années, fait de ces va-et-vient, il en résulte un film un peu foutraque et plein de pudeur dont les imperfections même le rendent attachant. Et c'est finalement moins la question d'approcher le loup qui importe que celle d'arriver à apprivoiser le berger, cet être rugueux qui hante les montagnes, à moins qu'il ne soit juste question du temps qui passe inexorablement.

Éva Tourrent
Responsable artistique de Tënk