À partir du fonds d’archives sonores de l'expédition Harvard Peabody en Nouvelle-Guinée néerlandaise (1961), une rencontre avec le peuple Hubula (plus connu sous le nom de Dani), et les histoires croisées de l’enregistrement de terrain, du film ethnographique et du colonialisme.
Réalisateurs | Ernst Karel, Veronika Kusumaryati |
Acteur | Olivia Cooper Hadjian |
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Comment relier le célèbre film ethnographique de Robert Garner "Dead Birds" et l’assaut de la prison d’Attica par la garde nationale en 1971 ? Une réponse possible : Michael Rockefeller. Arrière-petit fils du magnat du pétrole John D. Rockefeller, cet homme était aussi le fils de Nelson Rockefeller, gouverneur de New York en 1971. Il participa par ailleurs à l’expédition anthropologique multimodale Harvard Peabody, menée entre avril et août 1961 en Nouvelle-Guinée occidentale, dont le film de Robert Gardner sur le peuple Hubula est issu. Michael était chargé de collecter des images et surtout des sons, qui forment la matière principale "d’Expedition Content". Nous voici donc immergés dans l’obscurité, invités à tâtonner dans un espace sonore qui convoque des paysages, des animaux mais surtout les Hubula eux-mêmes, à travers leurs chants et leurs conversations. Il s’agit donc du hors-champ sonore de "Dead Birds", où leurs voix étaient davantage traitées comme des bruits que comme des vecteurs de sens. Privés de leurs mots, les Hubula y apparaissent comme un peuple aux riches coutumes mais néanmoins primitif, décrit par la voix quasi-divine de Gardner. Il y a donc de quoi être surpris lorsque les archives révèlent que les Américains envoyés par Harvard sont bel et bien venus en terre étrangère avec leurs corps, et pas seulement avec leurs esprits. En revisitant l’histoire d’un film, Ernst Karel et Veronika Kusumaryati touchent à une problématique de la plus grande envergure : les relations qui nouent les idéologies, les représentations et le sort de peuples entiers.
Olivia Cooper Hadjian
Membre du comité de sélection de Cinéma du réel,
critique pour Critikat
Comment relier le célèbre film ethnographique de Robert Garner "Dead Birds" et l’assaut de la prison d’Attica par la garde nationale en 1971 ? Une réponse possible : Michael Rockefeller. Arrière-petit fils du magnat du pétrole John D. Rockefeller, cet homme était aussi le fils de Nelson Rockefeller, gouverneur de New York en 1971. Il participa par ailleurs à l’expédition anthropologique multimodale Harvard Peabody, menée entre avril et août 1961 en Nouvelle-Guinée occidentale, dont le film de Robert Gardner sur le peuple Hubula est issu. Michael était chargé de collecter des images et surtout des sons, qui forment la matière principale "d’Expedition Content". Nous voici donc immergés dans l’obscurité, invités à tâtonner dans un espace sonore qui convoque des paysages, des animaux mais surtout les Hubula eux-mêmes, à travers leurs chants et leurs conversations. Il s’agit donc du hors-champ sonore de "Dead Birds", où leurs voix étaient davantage traitées comme des bruits que comme des vecteurs de sens. Privés de leurs mots, les Hubula y apparaissent comme un peuple aux riches coutumes mais néanmoins primitif, décrit par la voix quasi-divine de Gardner. Il y a donc de quoi être surpris lorsque les archives révèlent que les Américains envoyés par Harvard sont bel et bien venus en terre étrangère avec leurs corps, et pas seulement avec leurs esprits. En revisitant l’histoire d’un film, Ernst Karel et Veronika Kusumaryati touchent à une problématique de la plus grande envergure : les relations qui nouent les idéologies, les représentations et le sort de peuples entiers.
Olivia Cooper Hadjian
Membre du comité de sélection de Cinéma du réel,
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