Kotelnitch est une petite ville à 800 kilomètres à l'est de Moscou. L'auteur y est d'abord allé sur les traces d'un prisonnier de guerre hongrois qui avait passé 55 ans, oublié de tous, dans un hôpital psychiatrique. Il y est retourné une première fois faire ce qu'il croyait alors être un film documentaire, puis une seconde fois pour enterrer une jeune femme qu'il avait connue là-bas, et qui a été assassinée par un fou. Il s'est rendu compte que ces trois tournages, étalés sur deux ans, racontait une histoire et que cette histoire était la sienne.
Réalisateur | Emmanuel Carrère |
Acteur | Benoît Hické |
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On connaît le goût de Carrère pour le récit de soi, sa capacité à se placer au milieu des évènements de sa vie et à tisser une toile très personnelle, jamais très loin d’une réécriture du réel. C’est ce qui se trame ici : l’écrivain / journaliste nous propulse sans luxe d’explications dans un train hors d’âge, topos d’une conversation incompréhensible. Puis il nous propose de le suivre dans un récit qu’il remet à l’endroit en voix off. D’un voyage à 800 km de Moscou sur les traces d’un prisonnier hongrois oublié de tous (qu’il détaillera plus tard dans Un roman russe), le récit glisse vers celui du meurtre à la hache d’une jeune femme russe francophile devenue une amie, et qui fût la compagne d’un officier du FSB. Suspicions, troubles et violences. Carrère raconte son film en train de se faire : le tournage chaotique et les cruciaux choix de montage. Le film s’invente sous nos yeux, parfois maladroit, obéissant à la force du réel. Ce processus exige de notre part une certaine patience. Elle est récompensée par des séquences saisissantes, captées sur le vif, que l'écrivain n’aurait pu inventer. Puisant dans d'autres vies que la sienne, Carrère livre ici son film le plus personnel qui, loin de se regarder avec complaisance, nous entraîne dans la fabrication d’un récit composé de plusieurs, à l'image d'un pays-gigogne tiraillé par les différentes versions de son Histoire.
Benoît Hické
Programmateur et enseignant
On connaît le goût de Carrère pour le récit de soi, sa capacité à se placer au milieu des évènements de sa vie et à tisser une toile très personnelle, jamais très loin d’une réécriture du réel. C’est ce qui se trame ici : l’écrivain / journaliste nous propulse sans luxe d’explications dans un train hors d’âge, topos d’une conversation incompréhensible. Puis il nous propose de le suivre dans un récit qu’il remet à l’endroit en voix off. D’un voyage à 800 km de Moscou sur les traces d’un prisonnier hongrois oublié de tous (qu’il détaillera plus tard dans Un roman russe), le récit glisse vers celui du meurtre à la hache d’une jeune femme russe francophile devenue une amie, et qui fût la compagne d’un officier du FSB. Suspicions, troubles et violences. Carrère raconte son film en train de se faire : le tournage chaotique et les cruciaux choix de montage. Le film s’invente sous nos yeux, parfois maladroit, obéissant à la force du réel. Ce processus exige de notre part une certaine patience. Elle est récompensée par des séquences saisissantes, captées sur le vif, que l'écrivain n’aurait pu inventer. Puisant dans d'autres vies que la sienne, Carrère livre ici son film le plus personnel qui, loin de se regarder avec complaisance, nous entraîne dans la fabrication d’un récit composé de plusieurs, à l'image d'un pays-gigogne tiraillé par les différentes versions de son Histoire.
Benoît Hické
Programmateur et enseignant
Français